Politique européenne: on demande du courage!
En résumé
La venue en Suisse de Maroš Šefčovič, vice-président de la Commission européenne, lors de la journée de l’Europe de l’université de Fribourg, a remis pour quelques heures la politique européenne sur le devant de la scène médiatique.
Son intervention a permis de rappeler des fondamentaux : la politique européenne de la Suisse n’est pas qu’un sujet de politique interne, ce que certains groupes politiques ont une fâcheuse tendance à oublier, et la Suisse et l’Union européenne sont liées par une communauté de destin. Notre pays a besoin d’un partenaire fort, capable de relever les multiples défis géostratégiques, énergétiques ou climatiques auxquels notre continent est confronté aujourd’hui.
Le chacun pour soi n’a pas d’avenir, en particulier pour la Suisse, au cœur de l’Europe et dont la prospérité dépend de son ouverture à l’extérieur. A cet égard, faut-il rappeler l’importance d’un accès sans discrimination au marché intérieur européen, pour un pays dont le volume des échanges en une seule journée avec l’Union européenne équivaut à une année avec l’Indonésie ?
L’interdépendance dépasse les seuls aspects économiques ou les questions transfrontalières. On oublie par exemple souvent la contribution de la Suisse à la politique de sécurité et de défense commune. Aujourd’hui, une lente érosion menace la voie bilatérale, accélérée par la décision du Conseil fédéral de ne pas signer l’accord-cadre. Les conséquences sont connues : exclusion de la recherche suisse d’Horizon Europe, le plus grand programme d’innovation au monde, perspectives bloquées pour de nouveaux accords sur l’électricité ou la santé, etc. Le statu quo n’est plus une option. Pour moderniser l’édifice des accords bilatéraux, il faut apporter une réponse aux questions institutionnelles. Notre partenaire, qui doit rendre des comptes à ses 27 Etats membres, veut assurer l’intégrité de son marché intérieur. Il pose comme condition une règle assez simple : qui veut les mêmes droits assume les mêmes obligations.
Du côté suisse, la gauche doit clarifier sa position pour le moins contradictoire entre refus de l’accord cadre et soutien à l’adhésion. L’UDC pour sa part devrait lancer dans le cadre de la campagne pour les élections fédérales une nouvelle initiative populaire mettant en danger la libre circulation des personnes. C’est jouer dangereusement avec le feu pour un parti gouvernemental. Un deuxième échec dans les discussions avec l’Union européenne n’est pas envisageable.
En janvier 1963, moins de 20 ans après la fin de la Deuxième guerre mondiale, Konrad Adenauer et Charles de Gaulle ont signé le traité de l’Elysée, considéré comme un acte clef dans la construction européenne. Puisque nous fêtons cette année les 60 ans de ce traité de réconciliation porteur à l’époque d’une vision d’avenir si courageuse, espérons que son esprit inspire à nos autorités une politique européenne qui ne soit pas pusillanime. Alors que des discussions exploratoires sont en cours, ce thème doit être remis au premier plan au vu de son importance stratégique pour la Suisse, qui a besoin d’un cadre clair et durable pour ses relations avec son principal partenaire.