L’épisode de la «dictature sanitaire» se termine en farce

En résumé

Le comique n’est pas la première caractéristique du débat politique suisse. Et pourtant, difficile de ne pas sourire en prenant connaissance des réactions à la consultation que la Confédération a récemment lancée. Il s’agit de déterminer qui devra faire quoi en cas de nouvelle poussée de la pandémie.

Un combat pour la liberté

Pendant des mois, des opposants aux mesures prises pour lutter contre le Covid-19 nous ont mis en garde contre la «dictature sanitaire» qui, selon eux, était en train de s’installer. Nos libertés étaient en train de nous être subrepticement ravies. Alain Berset révélait des penchants autocratiques et les cantons n’étaient pas en reste. La véritable nature du pouvoir apparaissait au grand jour, comme lors de l’incendie du Reichstag, en 1933. Certains ne se privaient d’ailleurs pas de puiser dans l’imagerie nazie pour décrire la situation.

La consultation qui a été ouverte dresse un tout autre tableau. Plutôt que de vouloir accroître leur pouvoir, les cantons et la Confédération cherchent à laisser les responsabilités aux autres. La Confédération veut ainsi attribuer aux cantons celle de décréter les mesures qui étaient dénoncées comme l’expression de la «dictature sanitaire». Il s’agit notamment du port du masque, de l’obligation de présenter un certificat COVID-19 dans certaines circonstances ou de la possibilité d’imposer quarantaines et isolements.

“Exercer des responsabilités peut impliquer de prendre des décisions impopulaires”

Loin de sauter sur cette occasion d’accroître leur pouvoir, les cantons n’en veulent pas, rapportait récemment la Tribune de Genève. Ils estiment que ces prérogatives devraient revenir à la Confédération.
Il y a de bonnes raisons à leur réticence. Lorsque les cantons étaient en charge et prenaient des décisions différentes de leurs voisins, cela était mal accepté par la population. Cela rendait d’autre part les mesures faciles à contourner – on se souvient des Genevois allant se faire couper les cheveux dans le canton de Vaud quand leurs coiffeurs étaient fermés. Il y a donc une certaine logique à prendre ce genre de décisions au niveau supérieur.

Il est plus piquant de voir la Confédération, naguère accusée de dérives dictatoriales, si peu désireuse d’exercer les pouvoirs que lui confère la loi sur les épidémies. Piquant, mais pas étonnant. Exercer des responsabilités peut impliquer de prendre des décisions impopulaires, ce que pas grand monde n’aime faire. Cela peut également coûter cher: qui ordonne une fermeture est tenu d’en assumer les conséquences financières.

Bref, loin d’être monté à la tête de nos responsables, l’épisode de soi-disant «dictature sanitaire» semble plutôt les avoir vaccinés contre l’excès de responsabilités. Les pompiers peuvent être tranquilles: aucun dictateur en herbe n’a envie de bouter le feu au parlement.