Genève internationale : Rapprocher davantage ses acteurs!
En résumé
2020 est une année particulière pour la Genève internationale, qui est dans son centenaire du multilatéralisme, tandis que l’ONU fête 75 ans de présence. Malgré l’annulation de nombreux événements physiques, un débat de fond est lancé autour de l’avenir de la coopération internationale.
C’est au sortir de la Première Guerre mondiale qu’a été créée la Société des Nations (SDN), dont le but premier était d’éviter à l’humanité de revivre des heures aussi sombres. Malheureusement, l’Histoire n’a pas donné raison à ces intentions généreuses. Aujourd’hui, la SDN n’est pas épargnée par les critiques, comme si certains avaient tendance à oublier l’essentiel: cette institution aura permis de poser les jalons du multilatéralisme que l’Organisation des Nations unies (ONU) a ensuite pu développer.
Cet automne, une exposition orchestrée sur la Place des Nations illustrait les réalisations essentielles que nous devons à la coopération internationale depuis un peu plus de cent ans. Certes, la SDN était imparfaite, mais elle a le mérite d’avoir permis l’émergence d’une première structure et de mécanismes multilatéraux, dont Genève est devenu le cœur», commence Raymond Loretan, président du Club Diplomatique de Genève. A l’époque, il aura même fallu une campagne soutenue pour que la cité de Calvin décroche l’attribution du secrétariat de la SDN, en particulier grâce à sa neutralité, qui était déjà incarnée par la présence du Comité international de la Croix-Rouge.
Avec l’installation de l’ONU et de ses agences, une nouvelle phase de la Genève internationale a pris le relai. «Avec l’implantation de nombreuses organisations gouvernementales, non gouvernementales et d’autres acteurs de la société civile autour de l’ONU, Genève est devenue le centre de décision dans des secteurs clé aussi divers que sont la paix, la sécurité et le désarmement, la santé, le droit humanitaire, les droits de l’Homme et les migrations, le travail, l’économie, le commerce, la science et les télécommunications et, enfin, l’environnement et le développement durable, résumés dans les dix-sept objectifs du développement durable de l’ONU, une sorte de feuille de route pour 2030», énumère Raymond Loretan.
En tant qu’Etat hôte, la Suisse offre à Genève un espace unique au monde, où la garantie de la sécurité et la présence de tout un écosystème nourri au fil du temps permet de tenir des réunions diplomatiques de premier plan. Grâce à ses bons offices, c’est à Genève que se sont négociés des traités fondamentaux
Poids significatif
Malgré ses atouts, certaines voix mettent en doute les apports du multilatéralisme dans le monde actuel. «Alors que l’ONU fête ses 75 ans, le monde n’a jamais été aussi bouleversé et il serait encore plus désorienté sans son existence», constate Raymond Loretan. «Avec cette crise sanitaire sans précédent dans notre histoire récente et ses répercussions économiques et sociales, nous avons malheureusement une fois de plus la démonstration de la nécessité de trouver des solutions globales.»
Avant la pandémie, Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU, avait d’ailleurs lancé la campagne ONU75 pour mener une très large consultation sur le rôle et les orientations stratégiques que devra prendre l’ONU. Avec la présence de trente-sept organisations internationales, près de quatre cents organisations non gouvernementales, cent septantehuit Etats représentés et deux cent cinquante-huit missions et représentations, sans oublier les visites de deux cent vingt et un mille délégués ainsi que quatre-mille sept cents chefs d’Etat ou de gouvernements (par année, en situation normale), le poids de la Genève internationale est significatif.
Dialogue accru
Pour l’économie locale, ce secteur concerne un emploi sur dix et rapporte près de six milliards de francs de revenus annuels. Face à ces chiffres, il est facile de comprendre pourquoi de nombreux concurrents internationaux rêvent de mordre dans ce gâteau. S’il est conscient de cette concurrence, Raymond Loretan croit à la solidité de la place genevoise. «La polarisation du monde actuel et la lutte entre grandes puissances pour étendre leur zone d’influence nécessite un dialogue accru pour maintenir une certaine stabilité et défendre les intérêts des autres pays», résume Raymond Loretan.
Pour lui, outre l’amélioration permanente des structures d’accueil de la communauté internationale, une des meilleures manières de renforcer la Genève internationale est d’améliorer la mise en réseau et les synergies entre ses différents pôles d’excellence et acteurs. Il s’agit également de rapprocher la Genève internationale de la population du canton. «Nous sommes sur la bonne voie. La Confédération, le canton et la Ville sont très proactifs dans ce processus et les acteurs privés, dont la Fondation pour Genève et le Club Diplomatique de Genève, jouent un rôle dynamique en rassemblant autour de différents événements et initiatives la diplomatie, la politique, l’économie et les milieux académiques.