Prise de vacances, compensation d’heures supplémentaires et RHT: quelques rappels
En résumé
À ce jour, un grand nombre d’entreprises bénéficie d’indemnités pour réduction de l’horaire de travail (ci-après: RHT), notamment du fait des fermetures toujours en vigueur ou de restrictions empêchant l’activité de ces entreprises de se déployer pleinement.
À ce jour, un grand nombre d’entreprises bénéficie d’indemnités pour réduction de l’horaire de travail (ci-après: RHT), notamment du fait des fermetures toujours en vigueur ou de restrictions empêchant l’activité de ces entreprises de se déployer pleinement. À l’heure où la période estivale se rapproche, accompagnée des décisions de réouvertures du Conseil fédéral, la gestion des vacances cumulées durant la fermeture et de la compensation des éventuelles heures supplémentaires des employés, de leurs coûts et de leur impact sur la reprise de l’activité économique de certains secteurs peut s’avérer compliquée. Un rappel de quelques règles et mécanismes, notamment en lien avec la RHT, ne semble pas superflu.
La prise de vacances: fixation des dates
Pour rappel, la date des vacances doit être fixée par l’employeur en tenant compte des désirs du travailleur dans la mesure compatible avec les intérêts de l’entreprise, conformément à l’art. 329c al. 2 CO. Le législateur confère à l’employeur un large pouvoir de décision pour la planification des vacances afin d’assurer le déroulement normal des activités de l’entreprise et la pérennité de celle-ci1. Toutefois, il a le devoir de prendre en considération les intérêts légitimes des employés si ceux-ci ne se heurtent pas à la sauvegarde de la bonne marche de l’entreprise2. L’employeur conserve la possibilité de refuser des dates de vacances proposées par l’employé si, durant celles-ci, la présence de l’employé est indispensable au bon déroulement de l’entreprise3.
Lorsqu’il n’est pas possible de faire coïncider les désirs de l’employé avec la bonne marche de l’entreprise, l’employé doit se conformer aux dates imposées par l’employeur conformément à son devoir de sauvegarde des intérêts légitimes de celui-ci4. La fixation des dates de vacances par l’employeur doit néanmoins permettre à l’employé de s’organiser et de préparer ses vacances. En principe, un délai de préavis de trois mois doit être respecté afin que ces objectifs soient réalisés5.
L’employeur privé d’activité du fait des mesures sanitaires et dont les employés n’ont pas pris de vacances durant plusieurs mois, cumulant ainsi des soldes importants, sera bien inspiré de s’atteler à la planification de ces vacances à brève échéance. Il peut, par exemple, octroyer un délai raisonnable à ses employés afin que chacun puisse communiquer un planning personnel tenant compte de l’ensemble des arriérés de vacances, voire même des vacances de l’année courante. Cette solution permettra de solder les vacances d’ici à la fin de l’année en question.
En possession de ces propositions de dates émanant des employés, l’entreprise pourra ainsi anticiper et s’organiser au mieux. Si des dates particulières sont prisées par une trop grande partie des employés, ayant pour conséquence que l’entreprise ne pourrait pas s’organiser avec autant d’absences, l’employeur pourra fixer de nouvelles dates de vacances compatibles avec la reprise de son activité. La communication de ces nouvelles dates au moins trois mois à l’avance permettra aux employés concernés de s’organiser sereinement.
La compensation des heures supplémentaires et de la RHT
Conformément à l’art. 321c al. 3 CO, en cas d’accomplissement d’heures supplémentaires, l’employeur est tenu de rétribuer les heures supplémentaires qui ne sont pas compensées par un congé en versant le salaire normal majoré de 25%. Les parties sont libres d’y déroger à condition de le prévoir par écrit6.
Les parties peuvent convenir dans le contrat de travail ou dans un règlement du personnel auquel le contrat de travail se réfère, uniquement une compensation en temps pour les heures supplémentaires. Le cas échéant et conformément à l’art. 321c al. 2 CO, la compensation en temps devra intervenir au cours d’une «période appropriée». Lorsque les parties n’ont rien prévu par écrit ou ont uniquement prévu la rémunération des heures supplémentaires en excluant explicitement ou implicitement la possibilité de les compenser en temps, l’employeur ne pourra les compenser en temps qu’avec l’accord de l’employé, sous réserve de règles contraires prévues par conventions collectives ou contrats-types de travail.
Au regard de la RHT, il est important de rappeler qu’avant l’entrée en vigueur des modifications urgentes voulues par le Conseil fédéral en vue de soutenir l’économie, l’ordonnance sur l’assurance-chômage et l’indemnité en cas d’insolvabilité (OACI) prévoyait que les heures supplémentaires effectuées par les travailleurs dans les six mois précédents l’ouverture du délai cadre d’indemnisation de la RHT devait être déduites des heures perdues7. Après l’ouverture du délai-cadre d’indemnisation, si des heures supplémentaires étaient effectuées lors d’une reprise d’activité et avant une nouvelle réduction de l’horaire de travail, alors ces heures supplémentaires, prises en considération cette fois-ci durant les douze derniers mois, devaient être déduites des heures nouvellement perdues8. Cette compensation préalable des heures supplémentaires a été suspendue par le Conseil fédéral lors de la première vague de la pandémie, mais sera à nouveau en vigueur dès le 1er juillet 2021, sauf décision contraire des autorités.
En d’autres termes, toutes les heures supplémentaires cumulées avant le premier décompte RHT déposé par l’entreprise et celles éventuellement effectuées depuis les reprises d’activités de 2020 et 2021, seront déduites des décomptes RHT avant de pouvoir bénéficier du paiement des indemnités et ce, dès le mois de juillet 2021. Par conséquent, ces heures devront être rémunérées ou compensées par l’employeur conformément aux conditions applicables exposées ci-dessus.
Un tel mécanisme pourrait s’avérer économiquement dangereux pour des entreprises disposant de peu de liquidités du fait de la crise et dont les employés avaient cumulé de nombreuses heures supplémentaires avant l’arrivée du virus. Afin d’éviter que le mois de juillet 2021 ait des conséquences financières importantes pour plusieurs entreprises, il est conseillé d’anticiper et compenser une partie de ces heures supplémentaires dès à présent, afin de répartir leurs coûts sur plusieurs mois.
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1 Message du Conseil fédéral, FF 1982 III p. 177.
2 Eric Cerottini, Le droit aux vacances: étude des art. 329a à d CO, thèse, Lausanne, 2001, p. 217.
3 Eric Cerottini, Commentaire du contrat de travail, J.-Ph. Dunand et P. Mahon (éd.), Berne, 2013, n°9 ad art. 329c CO.
5 Eric Cerottini, Commentaire du contrat de travail, op. cit., n°16 ss ad art. 329c CO; Christian Favre, Charles Munoz, Rolf A. Tobler, Le contrat de travail, Code annoté, 2e édition, Lausanne, 2010, rem. 2.1 ad art. 329c CO.