Le Covid-19 a changé la mobilité des Suisses
En résumé
L’Office fédéral de la statistique a publié les résultats de son enquête sur la mobilité. Les données récoltées en 2020 et 2021 montrent comment les Suisses ont modifié leur façon de bouger avec l’arrivée de la pandémie.
En moyenne, l’ensemble des personnes interrogées dans le cadre de l’enquête sur la mobilité de l’Office fédéral de la statistique (OFS) parcourait 31,6 kilomètres par jour au début de l’année 2020. A la même période de l’année 2021, ces mêmes personnes en parcouraient 21,8. A la suite de la pandémie, l’OFS et l’Office fédéral du développement territorial (ARE) ont récolté des données exceptionnelles. Contrairement aux autres années1, celles-ci sont groupées sur deux périodes courtes, du 12 janvier au 7 mars 2020 et du 10 janvier au 6 mars 2021.
DÉPLACEMENTS MOINS NÉCESSAIRES
Lors d’une journée type au début 2021, 82% des personnes interrogées s’étaient déplacées hors de leur domicile au moins une fois. L’année précédente, alors que la pandémie n’avait pas encore frappé la Suisse, elles étaient 88%. La tranche d’âge la plus concernée par la diminution des déplacements est celle des 18 à 24 ans. Pour l’OFS, cela s’explique par la mise en place des cours à distance. Les plus de 80 ans, qui faisaient partie des personnes à risque, arrivent à la deuxième place, avec une diminution de 10%. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la pandémie ne fait pas partie des premiers motifs évoqués au moment de justifier l’absence de déplacement. En effet, seul 10% des Suisses interrogés ont évoqué le Covid-19. L’un des premiers motifs est «l’inutilité de sortir» (23%). Un argument qui fait écho aux fermetures imposées au moment de la deuxième année d’enquête.
Les restaurants, les commerces non-essentiels, les établissements culturels et des installations de loisirs et de sport ont en effet été fermés jusqu’à fin février. Un début d’année 2021 froid et pluvieux a également incité les gens à rester à domicile. Le temps de trajet et les distances parcourues ont diminué: en 2021, une personne parcourait en moyenne 9,1 kilomètres par jour, soit 31% de moins qu’au début 2020. Ici aussi, ce sont les 18-24 ans qui ont le plus réduit la longueur de leurs trajets avec une baisse de 17 kilomètres. C’est dans les villes que la distance parcourue a le plus diminué (32%). La possibilité de trouver plus facilement qu’en zones rurales des biens de première nécessité à proximité de son domicile explique ce résultat. Concernant le temps de trajet, celui-ci est passé de 83 minutes par jour en 2020 à 71,3 minutes par jour un an plus tard, soit une baisse de 14%. Ce chiffre est moins élevé que pour le nombre de kilomètres parcourus, «cette différence s’explique par le type de moyens de transports utilisé», souligne l’OFS.
LES TRANSPORTS PUBLICS MOINS PRISÉS
«Les véhicules et les arrêts de transports publics présentant parfois une forte concentration de personnes dans un espace réduit, ces moyens de transport font l’objet d’une attention particulière depuis le début de la pandémie, car ils représentent de possibles lieux de propagation du virus.» Cela explique pourquoi ils ont connu la plus forte diminution de fréquentation. Alors qu’une moyenne de 7,5 kilomètres était parcourue par jour et par personne en transports publics et ferroviaires en 2020, celle-ci passe à 3,6 kilomètres en 2021: une diminution de plus de 50%. La tranche d’âge qui a le plus continué à emprunter ce moyen de transport est celle des 80 ans et plus. «Ces personnes n’ont souvent pas d’autres possibilités que les transports publics pour se déplacer.» N’étant pas considérés comme propices à la transmission du virus, les trajets effectués en voiture individuelle ou en deux-roues motorisés ont décru de façon moins significative (-27%).
Les Suisses se sont mis à la marche. Le temps journalier passé à marcher a grimpé de 49,4% entre 2020 et 2021. Concernant le vélo, il a également gagné du terrain, mais timidement: le temps de trajet journalier est passé de 4,1% à 4,9%. Pour l’OFS, la météo est un facteur explicatif: «La différence aurait été plus grande si le mois de janvier 2021 avait été aussi doux et ensoleillé que celui de 2020», lit-on dans le rapport.
L’IMPACT DU TÉLÉTRAVAIL
L’obligation de télétravail pour les activités s’y prêtant a été mise en place le 18 janvier 2021, soit huit jours après le début de l’enquête. Le régime de télétravail n’a pas été le même pour tout le monde, notamment selon le type de profession, et cela a influencé les distances moyennes parcourues. Selon la profession, le télétravail était impossible, soit partiellement possible, soit possible. Les groupes avec la plus forte diminution de distance parcourue sont ceux liés aux «professions intellectuelles et scientifiques» et ceux liés aux «emplois de type administratif». Dans ces deux groupes, la mise en place du télétravail était partiellement ou totalement possible. A contrario, dans celles en lien avec des activités manuelles, la distance n’a que très peu décru.
En 2020, 38% des personnes interrogées pouvait travailler depuis leur domicile. «Étonnamment, les actifs occupés pouvant exercer leur activité professionnelle à domicile ont eu tendance à réaliser des déplacements pour le travail plus longs que ceux des personnes n’étant pas en mesure de travailler chez elles.» L’explication pourrait venir du fait qu’ils sont plus facilement disposés à parcourir de longues distances lorsqu’un déplacement est nécessaire, suggère l’OFS. Un an plus tard, ce groupe d’actifs avait augmenté pour atteindre 50%. Quant à leurs déplacements, ils sont passés de 18,3 kilomètres par jour à 9,5 kilomètres. Concernant le groupe d’actifs ne pouvant pas effectuer de travail à distance, un décroissement du nombre de kilomètres parcourus a également été noté, mais il reste faible. Ces diminutions montrent l’impact sur les travailleurs des mesures prises par le Conseil fédéral en matière de télétravail.
1 Plus de six mille personnes sont interrogées tous les cinq ans dans le cadre du microrecensement mobilité et transports. Le recensement pour 2020 a été interrompu par la pandémie début mars. Cela a permis de connaître la mobilité des Suisses avant la pandémie et de la comparer un an plus tard, alors que le deuxième semi-confinement avait eu lieu.