Nouveau droit de la SA: Quels impacts sur le droit du travail?
En résumé
Meilleure représentation hommes-femmes dans les directions, lutte contre les rémunérations abusives: voilà les aspects de droit du travail intégrés au nouveau droit de la SA.
Le nouveau droit de la SA (dont le contenu a été brièvement présenté dans Entreprise romande du 3 février dernier), adopté par le parlement le 19 juin 2020, est entré en vigueur en partie le 1er janvier 2021, pour le reste le 1er janvier 2023. Deux aspects de ce nouveau droit concernent directement le droit du travail: premièrement les quotas dans les directions, deuxièmement la lutte contre les rémunérations abusives. Ce sont ces deux points que nous présenterons ici.
I. Quotas dans les directions
Depuis le 1er janvier 2021, l’article 734f du Code des obligations (CO) encourage la représentation de chaque sexe tant dans les conseils d’administration que dans la direction de certaines grandes sociétés. Cette disposition s’applique aux sociétés anonymes cotées en bourse qui dépassent les valeurs fixées à l’article 727 al. 1 ch. 2 CO, c’est-à-dire qui, au cours de deux exercices successifs, dépassent deux des valeurs suivantes:
- total du bilan: 20 millions de francs;
- chiffre d’affaires: 40 millions de francs;
- effectif: 250 emplois à plein temps en moyenne annuelle.
D’autres sociétés peuvent prévoir dans leurs statuts que l’article 734f CO susmentionné leur est applicable1.
Selon cet article, si la représentation de chaque sexe n’atteint pas au minimum 30% au sein du conseil d’administration et 20% au sein de la direction, le rapport de rémunération de ces sociétés doit mentionner les raisons pour lesquelles la représentation de chaque sexe n’atteint pas le minimum prévu, ainsi que les mesures de promotion du sexe le moins représenté.
Des périodes transitoires sont prévues. S’agissant des membres du conseil d’administration, le rapport de rémunération devra contenir les informations susmentionnées pour la première fois au plus tard à compter de l’exercice débutant cinq ans après l’entrée en vigueur du nouveau droit, à savoir pour l’exercice débutant le (ou après le) 1er janvier 2026. S’agissant des membres de la direction, ce délai est de dix ans, ce qui signifie que le rapport de rémunération devra contenir ces informations au plus tard à compter de l’exercice débutant dès le (ou après le) 1er janvier 2031.
II. Rémunérations abusives
Depuis le 1er janvier 2023, les dispositions de l’ordonnance contre les rémunérations abusives dans les sociétés anonymes cotées en bourse (ORAb) – ordonnance qui était entrée en vigueur en 2014 à la suite de l’acceptation de l’initiative populaire Contre les rémunérations abusives (initiative Minder) en 2013 – ont été intégrées dans le Code des obligations. Elles figurent principalement aux articles 732 à 735d, mais certaines ont été intégrées dans d’autres chapitres du CO ou dans d’autres lois LPP2, Code civil, Code pénal).
A quelques détails près, les nouvelles dispositions reprennent celles de l’ORAb.
Ces dispositions limitent le versement d’indemnités et l’octroi de prêts à des membres du conseil d’administration, de la direction et du conseil consultatif des sociétés anonymes cotées en bourse, voire aux proches de ces personnes. Certaines indemnités sont même interdites (la liste a été étendue), comme, par exemple:
- les indemnités de départ convenues contractuellement ou dans les statuts et qui sont dues après la fin du contrat,
- les indemnités découlant d’une interdiction de faire concurrence qui dépassent la rémunération moyenne des trois derniers exercices ou celles découlant d’une interdiction de faire concurrence qui n’est pas justifiée par l’usage commercial,
- les indemnités versées en relation avec une précédente activité en tant qu’organe de la société, qui ne sont pas conformes à la pratique du marché,
- les primes d’embauche qui ne compensent pas un désavantage financier établi,
- etc.
L’assemblée générale doit voter, une fois par année, sur les rémunérations de ces personnes. Le rapport de rémunération doit les mentionner de manière relativement détaillée.
La durée des contrats qui prévoient les rémunérations des membres de la direction et du conseil consultatif est également limitée: s’il s’agit de contrats de durée déterminée, ils ne doivent pas excéder un an; s’il s’agit de contrats de durée indéterminée, le délai de congé ne doit pas excéder un an.
Une période transitoire de deux ans, soit jusqu’au 31 décembre 2024, est prévue pour l’adaptation des statuts, règlements et contrats à ces – pour partie nouvelles – règles sur les rémunérations abusives.
- Art. 732 al. 2 CO.
- Loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité