Faut-il rémunérer les pauses d’allaitement?
En résumé
Le temps consacré à l'allaitement dans l'entreprise doit être entièrement comptabilisé comme temps de travail.
Jusqu'au 31 mai 2014, l'article 60 al. 2 de l'ordonnance 1 relative à la loi sur le travail (OLT1) se limitait à régler les modalités de la comptabilisation du temps d'allaitement comme du temps de travail pour les femmes qui allaitaient, et cela au maximum durant la première année de vie de l'enfant. Ainsi, le temps consacré à l'allaitement dans l'entreprise devait être entièrement comptabilisé comme temps de travail, alors que seule la moitié de la durée de l'absence de la travailleuse était considérée comme temps de travail si cette dernière quittait l'entreprise pour allaiter. La loi n'imposait toutefois pas la rémunération des pauses d'allaitement.
Ratification de la convention 183 de l'OIT
A la suite de l'adoption par l'Assemblée fédérale d'une initiative parlementaire au mois de décembre 20121, le Conseil fédéral a été habilité à ratifier la convention n°183 de l'Organisation internationale du travail (OIT) sur la protection de la maternité. Or, cette ratification nécessitait que le droit suisse soit conforme aux dispositions de cette convention, en particulier à son article 10, lequel prévoit la rémunération des pauses d'allaitement. Le 30 avril 2014, le Conseil fédéral a donc adopté la révision de l'ordonnance 1 relative à la loi sur le travail et a décidé de ratifier la convention n°183 de l'OIT. La révision est entrée en vigueur le 1er juin 2014.
Depuis le 1er juin 2014
Le nouvel article 60 al. 2 OLT1 prévoit que l'employeur est désormais tenu de rémunérer, dans certaines limites, le temps que la travailleuse consacre à l'allaitement. La distinction qui était faite entre le temps d'allaitement en entreprise ou à l'extérieur de l'entreprise a été abolie.
Le texte précise que les mères qui allaitent peuvent disposer du temps nécessaire pour allaiter ou pour tirer leur lait et que ce temps est comptabilisé comme temps de travail rémunéré au cours de la première année de vie de l'enfant. La durée minimale des pauses d'allaitement qui doit être accordée à titre de temps de travail rémunéré est de trente minutes pour les mères qui travaillent jusqu'à quatre heures par jour, de soixante minutes pour les mères qui travaillent plus de quatre heures par jour et de nonante minutes pour celles qui travaillent plus de sept heures par jour.
Quelques précisions
La loi prévoit que les mères qui allaitent peuvent disposer des temps nécessaires pour allaiter ou pour tirer leur lait et que ces pauses doivent être rémunérées. Le droit à des pauses d'allaitement rémunérées n'est donc pas automatique. L'employeur n'aura ainsi l'obligation d'accorder à la mère des pauses d'allaitement rémunérées que si le temps d'allaitement, respectivement pour tirer le lait, interfère avec la journée de travail de cette dernière. De même, si la mère travaillant huit heures par jour n'a besoin que de trente minutes durant la journée pour allaiter ou pour tirer son lait pendant les heures de travail, elle ne pourra prétendre à une pause plus longue.
Le temps nécessaire à l'allaitement prévu à l'art. 60 al. 2 OLT1 peut être pris en une seule fois ou être fractionné selon les besoins physiologiques de l'enfant2. Si la mère allaite son enfant (ou tire son lait) plusieurs fois dans la journée, le temps nécessaire à l'allaitement pourra ainsi être fractionné en plusieurs pauses, que l'allaitement s'effectue dans ou à l'extérieur de l'entreprise. Si cela est nécessaire, la travailleuse et l'employeur peuvent également convenir que la période d'allaitement rémunérée sera prise au début ou à la fin de la journée de travail.
La mère qui souhaite bénéficier de pauses d'allaitement rémunérées doit être en mesure d'apporter la preuve à l'employeur qui le demande qu'elle allaite effectivement son enfant, en produisant par exemple une attestation de son médecin. De plus, il lui incombe d'aviser son supérieur hiérarchique avant chaque absence3.
Les pauses d'allaitement rémunérées ne sont pas considérées comme du temps de repos légal ou comme temps de repos compensatoire. Elles ne peuvent pas être déduites d'un crédit de vacances ou d'heures supplémentaires4.
Seules les durées de pause prévues par la loi5 sont comptabilisées comme du temps de travail rémunéré, que la travailleuse allaite dans l'entreprise ou quitte son lieu de travail pour allaiter. Toutefois, en vertu de l'article 35a LTr, les mères qui allaitent ne peuvent être occupées sans leur consentement et peuvent disposer du temps nécessaire à l'allaitement. Ainsi, si la mère souhaite disposer de pauses plus longues, l'employeur ne peut s'y opposer, mais le temps supplémentaire ne sera alors pas rémunéré.
L'article 60 al. 2 OLT1 fixe des minimas de temps de travail rémunérés. Les parties peuvent naturellement convenir d'étendre la durée des pauses d'allaitement comptant comme temps de travail rémunéré et en préciser les modalités.
Recommandation
L'organisation des pauses d'allaitement doit être discutée entre l'employeur et la collaboratrice et nécessite un rapport de confiance réciproque. Au retour du congé de maternité de la travailleuse, il est conseillé à l'employeur de prévoir un entretien avec son employée pour lui demander si elle allaite son enfant et, dans l'affirmative, comment elle souhaite s'organiser pour allaiter ou pour tirer son lait. Il est recommandé de trouver un accord qui tienne compte à la fois des besoins de la mère et de l'enfant, et des contraintes organisationnelles de l'employeur. n
1Initiative parlementaire 07.455 Maury Pasquier
2Secrétariat d'état à l'économie,
Commentaire de l'ordonnance 1 relative à la loi sur le travail, p. 160-2
3Art. 35a al. 2 LTr
4Secrétariat d'état à l'économie, Commentaire de l'ordonnance 1 relative à la loi sur le travail, p. 160-2
5Art. 60 al. 2 2e phrase OLT1, soit 30, 60, 90 minutes